LE GRAND BALLON
Il aurait voulu lui dire :
Le monde comme un grand ballon,
Plein d’espoir et de sève.
Un grand ballon…
dans le rire d’étoiles.
Il regardait l’enfant qui allait s’endormir
Et ne savait plus ce qu’il fallait dire…
Il aurait voulu lui raconter :
La terre, plantée d’arbres et de roseaux ;
La terre, comme un grand champ de rêve,
Sur les chevaux du vent,
Un grand ballon…
salivé d’océans
Qui balance entre l’âge de pierre et d’or
comme un bateau à voiles…
Mais il pensait le monde en mal d’oiseaux,
Dans l’aile des saisons mouillées d’ennui,
En cherchant les mots qui rassurent.
Mais il respirait la pluie,
Sous la blessure… de son silence…
Il regardait l’enfant s’endormir.
Il aurait voulu lui révéler
La vérité, la vérité du ciel sans soleil,
derrière le mensonge des nuages.
Lui avouer… la liberté égarée au labyrinthe des songes.
Il aurait voulu crier !
Crier ! Le monde en mal de paix,
Lardé de cicatrices bleues
Qui coulent du venin des hommes !
Il aurait voulu maudire… Lui expliquer,
Pour se donner la force de rester,
De recommencer avec lui le monde…
Lui crier ! le passé… comme un couteau planté
Au mur de l’histoire des hommes…
Mais il l’aurait réveillé.
Le monde comme un grand ballon
Crevé… D’où la mort suinte encore
Des montagnes dans un jus noir.
L’enfant dormait profondément.
Il aurait pu lui dire…
Mais il laissa l’enfant, seul,
face à la nuit..
Gibbon
La chute est rude. Mais la génération qui monte est très consciente. Est-ce qu’elle saura, ou pourra , rattraper le temps gâché ?
Je rejoins Cachou, laissons les rêver. Mais pas optimiste pour mes petits-surgeons. pas gai ton texte, mais joliment exprimée, cette cata en marche;
Une poésie tendre et crue. Il a eu raison de ne pas dire, il ne faut pas exposer nos angoisses aux enfants.
j’espère un changement de société, et il devra avoir lieu, coucou Gibbon.
C’est bien la question ! De plus en plus urgente.
Dis, tu te rappelles
Les jours étaient beaux
On lisait, ma belle
Des vers de Rimbaud
Ca sentait les roses
Et les fleurs des champs
On avait des choses
A faire, des enfants
Dis, tu te rappelles
Là-haut au verger
Pommes et mirabelles
Qu’on aimait manger
On voyait la lune
Pleine ou en quartier
Près de la lagune
Le chemin côtier……
Est venue la guerre
Et des champignons
Ont couvert la terre
Comme nous le craignions…
Tu vois, mon cher ami, je partage ton pessimisme.Bon, bonnes vacances tout de même …..
Pas gai ton texte, mon Gilbert… As-tu mis quelques notes musicales là-dessus, pour la légèreté, pour la nostalgie, pour le bruit des mots ?
« Il laissa l’enfant, seul, face à la nuit »
Que faire de toute façon lorsqu’il est trop tard.
Oui Cachou, il reste le rêve.
On a fait des enfants, sans trop se poser de questions, et aujourd’hui devant nos petits-enfants, on s’inquiète, oui, on s’inquiète VRAIMENT de ce que sera leur avenir sur cette terre exsangue, tuée par l’avidité de quelques-uns.
Et malheureusement, ça continue malgré l’urgence.
Peut-être qu’il faut, maintenant qu’il est (trop) tard, laisser dormir les enfants, les laisser rêver !