Par Mékilef

C’est dans le cadre de ma participation à une Association d’échanges de savoirs que j’ai rencontré Bastien. Je cherchais depuis quelques mois quelqu’un qui m’apprenne à me servir d’un logiciel de dessin. Il m’est présenté en ces termes:
« C’est un jeune graphiste qui s’est installé à son compte et qui habite Chelles. Il est intéressé par ce que nous faisons. »
Un jeune Pro qui aurait troqué la stratégie « gagnant/gagnant » contre l’échange gratuit, ça existe, ça ? ! On pourrait donc encore de nos jours garder espoir dans l’avenir du monde ?! 

Je lui téléphone, il répond tout de suite, on prend rendez-vous :
«  -Quand vous voulez !
– On peut se dire « Tu » ?
– Oui bien sûr, c’est plus sympa.
– Alors quand ?
– Quand tu veux, en ce moment, j’attends une réponse sur un appel d’offre, j’ai tout mon temps.
– OK, alors lundi après-midi chez moi, comme ça on pourra voir ça directement sur mon ordinateur.
Le lundi , il arrive en vélo. Rien d’un jeune cadre dynamique aux canines qui labourent le sol, on boit un café et on se met sur l’ordinateur. On y passe trois heures et il reviendra 3 fois. Maintenant encore, si j’ai un problème, je peux l’appeler.
Bien sûr, il m’a montré ce qu’il faisait et j’ai tout de suite pensé à l’inviter sur l’Espricerie.

M – Infographiste 3D, c’est ton travail aujourd’hui, tu as donc un site, est-ce qu’on peut aller y jeter un coup d’oeil pour se faire une idée ?Ah ! Oui ! Là, rien à dire, on est scotché par la qualité et la précision de la création, trait, ombres, lumières et reflets, mouvement.

B.S. – Un collègue m’avait fait remarquer que si je voulais trouver du taf,

Il fallait que j’affiche au premier regard ma face « sérieux-pro », sinon les clients potentiels passent vite, ils cherchent la compétence, s’ils ne la voient pas tout de suite, ils vont chercher ailleurs.

M – Je suppose que c’est un long parcours pour en arriver à cette qualité d’image. Est-ce que tu  dessines depuis longtemps ?

B.S. – (Le dessin qu’on voit ici est assez récent mais) A l’école primaire j’ai fait du dessin de natures mortes, mais aussi du sport (natation principalement). J’ai également essayé d’autres sports comme beaucoup d’enfants  qui se cherchent.

 

Alors que j’étais au collège, mon père s’est remis au handball qu’il m’a fait découvrir et donné envie de pratiquer. Durant tout le collège, j’ai intensifié mon entrainement pour me diriger vers un sport-étude au lycée à Toulouse.

 

M – Tu as donc laissé tomber le dessin au profit du sport ?

B.S – C’est vrai mais j’ai également découvert les jeux vidéo et j’ai beaucoup joué car j’aimais découvrir de nouveaux univers visuels, sonores, gameplay. Il y avait aussi une notion de challenge à avancer dans le jeu qui me plaisait.

 

En fin de Lycée, je ne pouvais pas vivre de la pratique du handball. Ma mère, sachant que j’aimais le dessin, les jeux vidéo, m’a proposé de faire à Tarbes un DUT SRC (Services et Réseaux de Communication). (Pas très responsable à l’époque, d’où le fait que ce soit ma mère qui ait trouvé cela pour moi). J’ai alors choisi d’arrêter la pratique du handball car l’esprit de compétition et les douleurs corporelles me lassaient.

M – Irresponsable ? Ou choix difficile quand on est adolescent? La présence de tes parents semble avoir été un atout pour toi.

B.S. – Pas très responsable car je ne me souciais pas de chercher des études à faire après. Pour exemple, je n’ai quasiment pas travaillé pour le BAC que j’ai eu à la repêche … A la fin du DUT, j’ai choisi de m’orienter vers des études graphiques de 3D. La grande générosité de mes parents m’a permis de faire une école privée de 3D/2D à Paris durant 3 ans. A la fin de cette école, n’ayant pas apprécié la ville de Paris, je suis retourné dans le Sud pour trouver du boulot sur Toulouse, mais sans succès (Book pas assez avancé et qualitatif, période de crise, moral dans les chaussettes)

 

M – Fin de la formation, donc, et c’est une difficile entrée dans la vie active ?

B.S. – Un ami travaillant dans l’aéronautique en tant que concepteur 3D m’a mis en relation avec la petite entreprise dont il faisait partie et qui souhaitait développer une branche 3D dans la joaillerie et autre. J’ai pu ainsi faire un formation de concepteur 3D dans l’aéronautique et un stage à la fin duquel je devais être embauché. Mais il n’y avait pas de poste à pourvoir malgré qu’on me dise que je bosse bien…

J’ai passé alors quelques mois à faire des boulots en tous genres en intérim (manoeuvre sur chantiers, ménages dans les hôtels, ouvrier dans une sablière, ouvrier dans une entreprise de ferronnerie, …)

M – Est-ce qu’on peut dire que les bonnes relations que tu es arrivé à tisser ont été décisives dans ton parcours ?

B.S. – Oui, oui et oui. Le relationnel est aussi important que les compétences et je le vois encore aujourd’hui, car la plupart des nouveaux clients que j’ai me sont arrivés sur recommandation d’une personne.

Un jour, un ami de l’école 3D de Paris m’a proposé un job dans une entreprise de Puteaux (ON-X). Ainsi, j’ai fait le choix de repartir à Paris pour me faire une expérience de travail et c’était aussi l’occasion de redécouvrir Paris, mais avec un boulot cette fois, et donc un peu de sous pour faire des choses dans la ville. Après 1 an dans cette entreprise, j’ai eu l’occasion de travailler au sein du studio de PSA.

Puis 2 ans après, lassé de ne travailler que dans le domaine automobile . . .

 . . . J’ai rencontré un free-lance qui souhaitait monter un collectif. Ainsi je suis allé de l’avant.

Aujourd’hui, je travaille surtout chez moi pour des clients sur Paris et il m’arrive d’aller travailler durant des périodes de production dans des studios sur Paris. J’apprécie de collaborer avec d’autres personnes, que ce soient des clients ou d’autres indépendants et ainsi de ne pas être, autant que possible dans un principe hiérarchique mais plutôt d’échanges épanouissants pour chacun.

Et ça me permet de manger !

M – Et maintenant alors ? Est-ce qu’il t’arrive d’avoir envie de créer d’autres choses, qui ne servent à rien par exemple, juste pour le plaisir ?

B.S. – OUI ! Mais c’est un peu caché dans un recoin de mon site

° ° °

Durant mon emploi chez PSA, J’ai suivi des cours du soir. Je vivais cela comme une soupape de décompression

 Merci à Charlotte Herben pour le choix de la méthode d’enseignement (équilibre entre technicité et expérimentation sur des temps de poses variants de 10 sec à 15 min ), pour la personne qu’elle a été durant ces cours : motivée, joyeuse, ouverte à la discussion, …

En général, ce sont des dessins réalisés sur le moment et pour la plupart il y a quelques temps à partir d’idées, de situations, sans volonté particulière autrement que l’expression de ce que je vis.

Les ronds d’herbes sont des dessins récents à la plume et encre de chine. J’ai choisi cet outil pour prendre le temps de dessiner tout en essayant de ne pas y mettre trop de volonté de bien faire.

J’utilise  aussi les enveloppes reçues par courrier comme brouillon pour noter des choses à faire de mon quotidien ce qui me permet de ne plus les avoir en tête. En voyant certaines enveloppes plus personnalisées cela m’a donné envie de faire des dessins à partir des motifs imprimés sur celles-ci.

 

Ainsi je laisse voyager mon imagination – pensée au regard de l’enveloppe que j’ai choisie et j’utilise des outils qui me paraissent correspondre sur le moment …

M – Aujourd’hui, est-ce  que tu dirais que l’expérience PSA est seulement négative ?

B.S.- J’ai appris à voir combien il peut y avoir du « l’épanouissant et du limitant » dans chaque expérience.

J’essaye d’être à l’écoute et donc de me nourrir de la richesse unique qu’est chaque personne que je rencontre.

J’aime apprendre et ne souhaite pas me spécialiser afin de développer une certaine expertise. Toutes ces rencontres m’accompagnent  dans mon souhait d’élargir mon champ d’activité et de compréhension pour m’amuser à créer et pour pouvoir élargir mon champ de potentiels clients. En ce moment et à titre personnel, je suis en cours de développement de vidéos courtes en 3D avec comme outil principal le fabuleux logiciel Houdini SideFX avec toutes les étapes que cela comporte (conception – story board – animation – modélisation des objets  – lumières et matériaux – FX (eau, feu, …) –  rendu en séquences d’images  – retouche finale). Je souhaiterais prochainement proposer cela à titre professionnel.

M – On voit que ton parcours a été difficile, on pourrait dire même à certains moments chaotique, et pourtant on voit peu à peu quelque chose qui se construit et te permet de faire une sorte de synthèse de tendances qui semblent s’opposer en toi. Pourquoi es-tu passé de la grosse boite (Peugeot) à l’indépendance, et comment maintenant s’organisent tes choix, tes priorités ?

B.S.- Je me questionne quand je sens que ça ne me convient pas à moi ou aux autres et j’essaye de réajuster.

 Je suis devenu indépendant pour de nombreuses raisons: besoin de changement, de varier les domaines d’activités pour lesquels je pouvais travailler, rencontrer des nouvelles personnes, m’extraire autant que possible des contraintes d’horaire de travail, temps de transports, grilles de salaires, hiérarchie, et aussi choisir mes outils (logiciels).

 Mon bien être est ma principale préoccupation car je souhaite vivre heureux et partager. Je ressens de plus en plus combien la vie est courte et incertaine ainsi cela se traduit par le fait de ne pas vouloir faire quelque chose en particulier mais plutôt d’apprécier chaque instant autant que possible en fonction de ce qui me paraît contribuer à mon bien être et à celui des autres. Cela laisse la place à un vide rempli de vie …

Ça passe par un certain nombre de choix qui impliquent des renoncements: pas de voiture, le minimum d’appareils électroménager, éviter les grands circuits de distribution et privilégier les modes d’échange et d’achats alternatifs (occasions, leboncoin, les marchés …), nourriture venant d’une agriculture locale la plus respectueuse possible de la nature, achetée en vrac ou au marché principalement, peu de viande, peu de sucre, peu de café, de poissons et d’aliments provenant d’animaux . Il s’agit d’une hygiène de vie et pas de lois immuables. Ces renoncements se sont faits petit à petit et j’y trouve un réel bienfait.

Régulièrement je me balade et me pose en forêt ou au bord du lac de la base de loisirs. J’aime écouter, voir, sentir la nature. J’en profite aussi pour cueillir des herbes pour la tisane et enlever les déchets plastiques ou autres de cette magnifique nature qui mérite tout notre respect. Enfin, je pratique la méditation, du yoga et du taichi style Wu.

Avoir plus de temps pour moi me permet d’être plus à l’écoute de moi-même et des autres …  Je participe à l’accompagnement aux devoirs d’enfants avec une association locale et  il m’arrive ponctuellement d’accompagner une thérapeute holistique pour des séances d’art thérapie dans un établissement d’accueil de jour pour personnes en situation de handicap.

 

 

Le site professionnel de Bastien SOTTERO:    http://www.bastiensottero.fr/

Créations libres : http://www.bastiensottero.fr/category/essais/

Accès aux Vidéos (parmi d’autres): https://vimeo.com/199032904

                                                                       http://www.bastiensottero.fr/marcheur/

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