Le laid reste-t-il laid ?
Une nouvelle édition, mise à jour dans le texte et avec de nouvelles prises… Car la « chasse » s’avère fructueuse, de plus en plus :-((
A force de promener ma carcasse et mon appareil photo dans la nature, de la campagne au bord de la mer, je suis arrivée à un constat de choc : lorsqu’on fait de la photo naturaliste, tôt ou tard on se surprend à photographier de nouvelles espèces qui poussent un peu partout et n’importe où, pas difficiles, et, en l’occurrence, je parle du pneu, des variétés de pneus, ou de la roue gainée de pneu si le stade végétatif n’est pas trop avancé…
Semés ici et là, donc, les pneus poussent et fanent tristement, longuement, très doucement.
Ainsi j’ai pu rencontrer des pneus de mer , immergés en partie, ou s’accrochant désespérément , celui-ci à un bastingage, celui-là à un quai. Seul souvent, ou en groupe pour se soutenir sans doute, à coté de bouée dont la couleur tranche avec leur noir uniforme, mais toujours fiers de leur reflet frissonnant et éphémère.
Il y a les pneus d’estuaire, les pôvres, tout enlisés, tout crottés… Mais ceux-là voient passer du beau monde à plume, plus blanc que blanc, dessinant de jolies arabesques….
Certains, dégonflés depuis belle lurette, sont rejetés sur les plages… Ils s’échouent doucement. Regardent les bateaux échoués eux aussi, au loin. Regardent les bernaches…
Ils reprendront la mer peut-être à la prochaine grande marée. Ils peuvent parfois avoir la chance d’être retenu par un pieu, sans doute par sympathie, un geste de reconnaissance envers ce cousin éloigné qui a échangé son « i » contre un « n ».
Les pneus aquatiques, en eau douce, pullulent aussi. Là, un qui côtoie un monstre de bois pourrissant dans une belle petite rivière. Là, un autre en bordure d’étang, a été récupéré et sauvagement cimenté pour servir de corps-mort à une barque de pêcheur. On découvre des merveilles lorsque les lacs temporaires sont asséchés, parmi les souches ou cette eau rouillée (?)…
Dans un hameau, l’un m’a fait de la peine : le voir ainsi fané, desséché, sur son dernier lit de feuilles mortes automnales, certes de châtaignier, mais quand même, en bordure de route…
A coté, 2 de ses congénères attendaient, dos au mur, de reprendre des forces pour s’enrouler ailleurs maintenant qu’ils étaient libérés de leur chaîne, et de leur essieu. Deux autres jouaient les sentinelles auprès des boites aux lettres.
Ils s’égayent en bande ou empilés sur les bords de chemins campagnards, prennent racine à l’ombre d’une haie.
Les variétés de pneus de prairie semblent nombreuses. Abandonnés au gré des vent, chacun d’eux repose seul sur le sol et l’herbe qui le recouvre petit à petit ; et même si certains ont la chance d’être investis par de petites fleurs, ils sont seuls et oubliés, séparés de leurs chères jantes qui gisent à peu de mètres d’eux.
Certains ont plus de chance et faneront leur vie accrochés à la roue qu’ils habillent depuis si longtemps , couple parfait !
J’ai même rencontré un bouquet de pneus camarguais qui prenait le soleil scintillant en se cachant derrière les massettes qui s’agitent au vent.
Depuis quelques temps je trouve des pneus de forêt, confortablement installés sur un lit douillet de feuilles mortes, recouverts chaudement par un drap de ces mêmes feuilles.
Et dernièrement, j’en ai croisés qui, enchaînés les uns aux autres, faisaient de l’escalade sur les rochers de Ouessant
U pneu de poésie

Qui pneu le plus pneu le moins. Quelle belle insertion d’image ! Bravo Sergent 😉
D’autant qu’en toutes circonstances, il faut toujours raisin garder.
Un beau spécimen, ma foi !
Il dort, ivre de raisin goûtu… l
C’est normal qu’il dorme ; il est crevé
Je dirais même plus : il est complètement à plat ….
L’art de trouver du beau dans le laid ! Dans la campagne , ils recouvrent les silos de maïs, et ensuite , ils polluent …
La nature reprend ses « aises » malgré tout ce que l’homme lui laisse en « héritage ».
Encore une série qui m’avait échappée. Et pourtant quelles images ! la vérité est au fond du pneu. Bise
Et le texte ! bref, je suis fan.
Tu as bien fait de rééditer. J’y suis revenue avec plaisir, dans ce laid qui est beau quand même et pourtant… Ton regard y est pour beaucoup.
Beuhh. Ils arrivent bien à en brûler en manif, mais c’est pas ça qui va faire avancer la réflexion sur la pollution.
Y’a pas qu’en manif 🙁

Je me suis tout de suite rappelée ton article précédent sur le même thème. Ces pneus ont beau être parfois très graphiques, tout ça me rend très morose en ce mois de janvier tristoune.
Quelques belles couleurs en consolation.
Pneus ou proues on en prend plein l’essieu !
Dans certains pays on recycle en objets usuels notamment des sandales (très résistantes…)
Mais s’il existe quelques rares espèces « nuisibles » celle ci est difficile à éradiquer ;0((
Ces pneus alpins encordés à Ouessant, quelle capacité d’adaptation (on dit aussi « résilience », c’est mieux) ! C’est vrai qu’aujourd’hui, la traversée de la mer de glace n’est bientôt plus qu’une promenade. Là ! C’est du sport ! Qu’est-ce qu’ils en chient !
Oui ! C’est bien vrai ! Il l’est !
Laid !
Mais pourtant, c’est parfois un corps mort bien vivant qui mâchonne son chewing-gum malabar et fait une grosse bulle rose.
Question: Est-ce que tu saurais plonger au fond des océans pour y faire des photos ? Il paraît que là-bas c’est pas triste non plus !
Bonne idée, cette réédition romancée !
On se demande comment certains sont arrivés là. Portés par la marée, on peut comprendre. Enchaînés par le marin soigneux, bien sûr. Mais posé là, en lisière d’un bois ?
Je remarque aussi que si la mouette est rieuse, elle est aussi facétieuse et pleine d’à propos.
Dans la série « que sont-ils devenus ? » : les déjantés !
C’est à la fois consternant, crispant, affligeant … et esthétique ! Finalement, à chaque fois que la nature reprend possession de ce que les hommes ont fabriqué ou construit, on découvre dans cette transformation un pathétique trésor, un renouvellement inattendu, une renaissance dans le déclin.
Et les oiseaux qui se rient de tout (surtout les mouettes…) l’ont bien compris !
PS : par contre, il y a des photos qu’on ne peut pas agrandir …
J’ignorais que les pneus avaient autant de vies. Dont certaines drolatiques, et décalées. J’ai beaucoup aimé ces images sur une thématique pas évidente. Et tes yeux agiles en font une histoire épique. Oui, j’aime beaucoup.
Très beau reportage : de l’art de poétiser le monde.
Tous les bons gags étant faits, que dire ? Que je ne les aime nulle part dans la nature, quelle que soit la beauté de tes photos et la poésie des situations … Sauf en blanc ou rouge sur le flanc des bateaux et des quais.
Tu fais beaucoup avec pneu de choses
Chui rev’nu en reprendre un pneu !
Ça devient préoccupant… Il va falloir que la nature statue sur le cas outchouc.
Ah ouais ! Pour les repas de Noël et jour de l’an … Les pneus avec de l’échalote un soupçon de vinaigre ou persillé, cela tient la comparaison avec les meilleurs fruits de mer …
Avec un grand cru, hein 🙂 !
Je n’en pneus plus de voir ces pauvres pneus à l’agonie, frappés l’un par une pneumonie, l’autre par un pneumothorax.
Le bonhomme Michelin a, quant à lui, su les réunir (dernière photo) pour un ultime voyage en roue libre !
Superbes photos Marie-Cécile
Ne sois pas triste Brigitte… c’est ainsi la vie des pneus rendus à la Nature !
Perso, je les aime bien tressés aussi :
clic !
ou en aides précieuses pour arbre à mobilité réduite :
clac !
(je préfère mettre les liens, sinon ça prend trop de place !)
Ah oui ! Géniales tes 2 photos, plus particulièrement l’arbre handicapé 🙂
Clac… Ça me rappelle quelque chose, mais quoi ?…
Et bien SAGE, tu perds la mémoire
Alors ça, c’est gonflé !!!!!
Mais c’est vrai qu’il y a une forme de beauté dans ces incongruités. Surtout les « pneus des champs » avec lesquels rapidement la nature fait corps. Il y en a même un (le dernier de la dernière série) qui semble n’avoir jamais existé pour que recueillir en son cœur des fleurs sauvages.
Et alors la dernière photo, elle est juste … épatante !