
La nuit bien enroulée dans ton sourire tendre
Et le sommeil bien clos par ton silence chaud,
Je retourne au passé des souvenirs de cendre
Dans mon espoir cerné par la douleur des mots.
J’y rencontre parfois une foule d’oiseaux,
Emprisonnés, perchés, séchés au coeur des livres.
J’y rencontre souvent, le grand désir de vivre
Et notre soif d’aimer parallèle au printemps,
Quand les corps décalqués s’enroulent et se délivrent
En océan bercé par les ailes du temps.
J’y rencontre parfois giclés aux quatre vents
Les cris désespérés qui saignent des cratères.
J’y rencontre au hasard des cahots de misère
Des porteurs de paroles aux propos monocordes,
Des bourreaux repentants qui geignent des prières
À des pendus gouailleurs qui sautent à la corde.
Sous l’arbre de vos mains, le silence est musique,
Dansez donc sur la rue, plastique ou bien cristal
Assis sur le béton lancez une harmonique
Pour chanter les saisons en langue végétale…
J’y rencontre parfois, parmi la multitude,
Des lendemains morts-nés, des rêves révolus…
J’y vois des enfants nus, issus de solitude,
Perdus dans le désert, au bout de leur voyage,
Aveugles tâtonnant dans des voies sans issues,
Étouffés par les bras d’un futur sans visage…
J’y rencontre bientôt une dernière guerre
Juste un dernier soupir, un rien, un dernier cri…
Au pays du mensonge, les droits sont bien inscrits
En serments mal écrits qui se cognent aux pierres,
Roulés dans les greniers, oubliés dans la nuit
Par dessus les moulins, au fond de nos rivières.
Il nous faudrait des mots précieux, inaltérables,
Pour porter au soleil la colère ou l’amour,
Il nous faudrait des chants aux reflets implacables
Pour supporter la mort comme un “conte à rebours”…
Comme un tambour crevé, une trompette vide,
La terre est labourée et au diable l’histoire :
Échange éclat d’obus, inerte et dérisoire,
Contre éclat de soc dur, fourbu de terre humide…
La parole et les mots ne sont que des regards,
Pour mémoire, en grimoire je vous livre mes yeux,
Coloriez-les en bleu, lancez-les au hasard
pour sourire le soir en vos espaces creux.
Le front bien reposé sur sa poitrine ronde
Je cueille le matin à la lueur du raisin
Chaque nuit dans ses mains elle tient le bout du monde
L’idée naît du silence et les mots n’y font rien…
Gibbon
Comment dire ? C’est juste et simplement magnifique.
Mention spéciale pour le « conte à rebours ».
Pour ce début d’année (et sans chinoiser le moins du monde), tu nous offres du grand « Gibbon en avant ».
Bravo encore !
Image, texte, mélodie ♥… la page idéale pour déconnecter un moment en ce début d’année maussade.
Merci à tous !
J’ai improvisé une mélodie sur mon poème. Même si les mots chantent tout seuls, j’en ai éprouvé le besoin… Je suis heureux que cela vous touche.
Les mots, la voix, la mélodie…
Je me suis laissée porter par ta nuit, peuplée d’espoirs et de désespoirs, peuplée de la tristesse des constats, mais qui s’ouvre et se ferme sur la douceur d’un sourire, la rondeur d’une poitrine et le silence souvent réparateur. ♥♥♥
Très beau poème. L’inspiration surréaliste (je ne sais pourquoi, j’ai pensé à des tableaux de Dalì à certains passages) supporte bien le rythme ternaire (et inversement).
C’est du sur-Gibbon !
Balade au fil de la nuit, déambulation lyrique entre songe et souvenirs, tu as été inspiré !
Les mots, les pensées de la nuit, se percutent, espoirs et désespoirs, images décousues, et de ces brides entraperçues jaillit le monde, notre monde, entre sourires et douleurs …
J’aime beaucoup, aussi, le bas-relief qui nous accueille sur cette page. Un étonnant tout petit format pour une grande force.
Alors là, c’est du grand Gibb. Bises !
Et le bas relief, sobre et beau, s’accorde bien avec ton texte chuchoté
Merci Gibb, c’est un très beau texte à écouter dans le silence.
Que ça fait du bien au réveil de l’ordinateur, que ça fait du beau