Tout d’abord, je vous remercie d’être allés jusqu’au bout de cette histoire et d’avoir montré de l’intérêt par vos commentaires.
Je crois comprendre que vous avez l’impression que ça se termine en eau de boudin et que ça vous laisse sur votre faim, voire frustrés. Je n’avais pas tort de prévoir l’explication du pourquoi du comment, c’est ce que je veux faire ici en commençant par le comment.
Au début, il y a une phrase qui me plaît bien, qui m’arrive on ne sait d’où, et qui me semble chargée d’un gros potentiel narratif, si je peux m’exprimer ainsi : Des quatre, c’était la plus petite. A ce stade, je n’ai aucune intention particulière, seulement une injonction de fournir du contenu pour le site. L’imagination faisant son œuvre, je me suis laissé porter par l’idée que ces quatre étaient les pièces d’un logis et pour m’amuser, j’ai donné à chacune un caractère propre. En même temps, et je ne sais toujours pas pourquoi, j’ai pensé aux quatre cases du cerveau des Shadoks, GA, BU, ZO et MEU, sans qu’il y ait un rapport avec ce que je racontais.
Mais le lien avec le cerveau s’était insidieusement installé. Puis il s’est imposé et il s’est renforcé quand j’ai mis en scène les habitants du logis. Par économie et aussi un peu par flemme, j’ai repris mes précédents personnages auxquels j’ai adjoint Charlotte, parce qu’elle rime avec chochotte.
Au passage, pour maintenir du suspens, j’ai terminé mes chapitres par un élément mystérieux, qui devait l’être pour le lecteur mais qui l’était également pour moi : quand je signale l’existence de la porte par exemple, au moment où j’écris, je n’ai aucune idée de ce qui va se passer à son sujet.
Avec ces personnages dans ces pièces, un projet un peu sérieux s’est cristallisé : si les pièces représentaient un cerveau, les habitants seraient ce qui compose une personnalité. Or, une expérience dans ma vie professionnelle passée m’a donné à connaître quatre axes qui orientent une personnalité : déterminé, factuel, imaginatif et empathique. J’imagine qu’il y a d’autres systèmes d’analyse du psychisme et je ne vais pas en débattre mais moi, je connaissais celui-là. J’ai donc distribué ces rôles à mes personnages.
J’avais ouvert la porte à la psychologie, j’ai vu entrer la psychanalyse. Et je me suis retrouvé à devoir évoquer le Moi, le Ça et le Surmoi. La porte trouvait enfin son utilité : derrière se trouvait ce qui n’est pas donné de connaître d’emblée.
Le Moi est représenté par ces quatre jeunes gens (Simone la directive, Bastien le factuel, Vincent l’imaginatif, Charlotte l’empathique) qui se coltinent la réalité : l’orage.
Dans un endroit difficilement accessible parce que derrière une porte fermée, à l’étage, réside le Surmoi, un homme de belle carrure dans un univers carré ; de même que le Ça, qui niche dans un tréfonds obscur et qui « chez moi » est un personnage hideux, à la fois fascinant et repoussant. Et cette porte s’ouvre avec une clé que détient une énigmatique poupée.
Si je peux bien expliciter la conduite de ces personnages de mon histoire, leur prêter un aspect ou des propos, en revanche je ne peux qu’effleurer leur interaction ; à mon niveau de connaissance du fonctionnement de notre psyché, je dois rester dans les généralités. Par ailleurs, je ne sais absolument pas ce que représentent concrètement la clé et la poupée (la connaissance et la conscience ? L’aliénation et l’âme ? Le destin et le Malin ?) ni ce que signifie le fait qu’ils passent définitivement d’un côté à l’autre de la porte.
C’est donc une allégorie que je vous ai servie là, sans en avoir a priori l’intention et j’ai bien peur qu’il n’y ait finalement pas de pourquoi. Maintenant, si vous avez des pistes pour donner une suite à cette histoire, ça peut être intéressant de la développer. J’ai bien une petite idée, mais…
Encore une fois, merci de votre présence.
Allégorie ! disait Dian Fossey en encourageant les primates de la forêt rwandaise.
C’est méta fort ta postface mais un peu intello pour moi. Ceci dit cette démarche intellectuel a accouché d’une bien belle nouvelle et c’est l’essentiel !
Moi ça me va. J’ai autant d’imagination qu’un parpaing, je ne me suis donc pas posé trop de questions.
Merci pour le coin lecture, monsieur Sage 😊
Je n’aurais jamais pensé à ça, je dois dire… Pourquoi pas… mais je ne vois pas très bien que quelqu’un devine spontanément cette interprétation, sauf imagination remarquablement fertile. Si tu devais publier ce texte ailleurs, il faudrait sans doute intégrer à la fin une phrase qui en donne la clé.
Sinon, ça ne m’étonne pas que tu aies commencé le texte par une simple phrase, ça se devinait plus ou moins. Ce n’est pas une mauvaise méthode d’ailleurs, ça impulse un rythme, si on arrive à tenir la longueur, c’est un exercice de voltige littéraire.
J’espère que cette nouvelle peut se lire aussi (et qu’elle offre un agréable moment de lecture) sans clé de décodage. Je ne ressens pas la même chose qu’un lecteur à propos de la fin, mais je retiens la remarque et je vais penser à expliciter le contenu dans une espèce de pirouette lumineuse.
Ah mais oui !!! L’éclairage était nécessaire, mais maintenant que la lumière est faite, tout cela me paraît en effet très bien agencé, presque évident. Je rejoins tout à fait le commentaire de Mékilef : le processus de création parfois nous échappe, surtout lorsqu’il s’agit de récits. J’ai aussi souvent commencé des textes sur une simple phrase sans savoir ce qui viendrait s’y greffer. Sauf que moi, je ne l’avoue pas souvent 😉
Merci pour cette nécessaire post-face. Je crois que je vais tout relire avec cette vision nouvelle …
Alors bonne relecture !
Ce qui est très marrant et intéressant dans ton explication, c’est de voir comment chemine une idée quand on la laisse aller.
Mais plus difficile je crois, et je trouve que tu t’en es pas mal sorti, c’est d’arriver à organiser quelque chose de cohérent et qui nous tient en haleine, sans perdre l’inspiration et la liberté de mouvement de la pensée du départ.
En tout cas bravo et merci pour cet éclairage.
Merci pour ce bravo.
Ah ! Ben si ! Le voilà finalement cet Epilogue !
Ah merci! Il est toujours passionnant d’avoir les clés (sic) du processus – et même si l’on doit ouvrir de nouvelles portes, à l’infini… – en bonus du produit livré :-))).
Pour la suite: comme ça finissait en « pour moi, il y aura plein d’autres choses » (ou quelque chose comme ça), à chacun.e de poursuivre (si le désir est là); on peut le faire en aparté ou en partage…à voir…?
Juste une remarque: je proteste énergiquement contre la vision/le concept d’un ça monstrueux et hideux…mais de quel droit???!!! (psychanalytique, sans doute…) ; pour moi le ça c’est la vie en nous, il n’y a pas de moi sans le ça et le surmoi n’est pas bien plus carré que le reste! (J’accepte de me faire éventuellement descendre pour avoir osé écrire/exprimer cela sans être une véritable « initiée » des diverses psychanalyses…mais quel culot!bref…)
Merci pour ce commentaire Irina. Ce que tu nous a montré en juin 2019 est en effet un Ça bien sympathique et bien étonnant.
Freudien par la forme, Mais Lacanien dans le fond (pour la symbolique et le langage.
Bravo en tout cas ! Pour ce travail d’élaboration et ton imaginaire toujours fertile…
Je ne m’y connais pas beaucoup, mais ce ne serait pas plutôt l’inverse, Freud ayant posé l’hypothèse fondamentale du Ça et du Surmoi ?