Je ne sais pas si vous en avez entendu parler, si vous vous êtes documentés sur ce sujet épineux, et si vous avez déjà un avis personnel sur cette question qui me hérisse, mais personnellement j’emmerde l’éducation positive.

Depuis Françoise Dolto, on sait que le bébé est une personne. Bon, ça, c’est plutôt OK. De toute façon, on s’en doutait quand même un peu. Non ?

D’autant qu’avec la baisse de la mortalité enfantine, on s’est mis à chérir nos petits, à les couver, à les choyer : il était devenu nettement moins dangereux pour notre équilibre de nous y attacher, et on ne s’est pas fait prier. Nous pouvons donc enfin nous investir affectivement dans leur présent, rêver leur avenir, et nous pencher sur leur éveil et leur éducation.

 Bref, après leur avoir « donné » la vie (à noter que dès le début, on leur impose une dette pour un truc qu’ils n’ont pas demandé), nous pouvions donc nous atteler à ce qu’ils deviennent de beaux enfants « bien élevés », et de futurs adultes épanouis.

 J’ouvre à nouveau une parenthèse en faisant remarquer qu’on ne devrait jamais traiter un enfant de « mal élevé » mais plutôt convoquer ses parents. Bref …
(sémantique, quand tu nous tiens …)

 

L’éducation « bienveillante et positive » consiste donc -très schématiquement- à valoriser systématiquement son tout-petit et le guider vers l’autodiscipline. Ainsi, il conviendra de lui dire : « oui mais » au lieu de « non parce que ».

Alors je ne sais pas si vous avez déjà élevé un ou plusieurs enfants, mais il n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup d’expérience pour se rendre compte que, devant une catastrophe imminente pour vos biens matériels, votre confort immédiat (ou futur), ou tout simplement pour éviter que le chérubin en mal d’expériences nouvelles se mette franchement en danger, le « non » qui sera suivi en léger différé de l’explication qui va bien, est nettement plus efficace qu’un « oui, mais … », le « mais » ne pouvant arriver qu’après que le passage à l’acte délictueux …
Et donc après le bobo, plus ou moins grave, le bibelot cassé ou les rideaux en charpie.

Sauf à avoir un sens de l’anticipation exceptionnel ou une attention focalisée à 100% de son temps sur l’être en état de construction (autrement dit le gniard), je ne vois pas bien …

 Moi qui pensais bêtement que l’apprentissage était construit d’interdits qui étaient levés progressivement avec l’élargissement des expériences et l’épanouissement de la raison … En fait, j’étais culpabilisante, perdue dans les méandres de ma propre culpabilité culturelle dont je n’avais pas su me départir, et je ne le savais même pas … Fallait-il être niaise !!! 

 

Mais si l’éducation positive m’emmerde profondément aujourd’hui, c’est aussi parce qu’elle vient perturber mon quotidien égoïste et enfin confortable. Je l’admets …
Même pas honte !
Parce que, voyez-vous, les parents investis de cette mission éducative si formidable, et qui se qualifient en plus de  « parents positifs » (ce qui, au demeurant, renvoie tous les autres au rang de « parents négatifs », merci bien …), atteignent inéluctablement et assez rapidement les tréfonds du burnout parental ….
Et qui c’est qui se les farcit, les petits positifs en culotte courte ? Hein ? Je vous le donne en mille … Ben ouais, c’est Mamie, avec ses bonnes vieilles méthodes bien ringardes qui cumulent (c’est dingue) tous les interdits de la « discipline positive » : ses « non », ses distributions d’images et de récompenses, et ses petits séjours de méditation au coin.

 

Force est de constater, néanmoins, que l’éducation des enfants reste, encore aujourd’hui, à charge de la mère, voire de la lignée maternelle. Et c’est là que je me mets vraiment en boule …

Car chacune, toujours, fait pourtant à la fois ce qu’elle peut, avec ce qu’elle a et ce qu’elle est, et ce qu’elle croit être le mieux. 

Mais, malgré cela, quels que soient ses choix ou ses contraintes, la mère aura toujours été celle à qui la société, l’école, parfois sa propre famille, voire ses enfants eux-mêmes, demandent des comptes, celle qui doit même, souvent, se justifier.
Fragilisée par cette charge morale et bien consciente des enjeux sociaux, elle va s’engouffrer pleine d’espoir dans les dernières méthodes pédagogiques en vogue. C’est d’autant plus formidable que chaque décennie en apporte une nouvelle, encore plus adaptée et révolutionnaire que la précédente !
Mais c’est comme les mises à jour de Windows : c’est merveilleux sur le papier … mais souvent, ça plante.

A noter au passage que les pères seront encensés dès qu’ils s’engageront un tant soit peu (même très ponctuellement) auprès de leur progéniture. Et ceux qui s’engageront vraiment dans l’éducation de leurs enfants seront alors qualifiés, quoi qu’ils fassent, de « formidables »…

 

Finalement, et si c’était à la société de passer à la bienveillance ?
Et si elle arrêtait enfin de culpabiliser les mères, rien que les mères … ?

C’est ça qui serait vraiment positif … Non ?

 

 

Illustration par Noah, 3 ans.

 

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